Prendre la route au volant d’une Renault six cylindres est toujours un grand plaisir de nos jours. Encore plus lorsqu'on se plonge dans l'histoire d'avant-guerre de notre marque préférée. En effet les rédacteurs du célèbre magazine français « l'Illustration » eurent l'occasion de s'échapper de l'agitation de la ville parisienne dans une Renault 40 CV. Un exercice qui, aujourd'hui encore, fait des émules.
Les problèmes de circulation et l’engorgement des villes ont toujours été récurrents au travers des années. Pour preuve l’article débute en retraçant l’attente du chauffeur au volant de l'énorme Renault avant de quitter la capitale française et ses rues bien trop étroites. Dans l’article la 40 CV, est nommée la "bête" spécialement équipée pour le voyage. Ils décrivent en termes choisis, presque poétiques, à l’instar du conducteur qui « traite » la voiture comme s'il s'agissait d'un animal noble.
L'énorme moteur est décrit comme un infatigable cœur de pierre qui peut à la fois vous rendre fou ou vous apaiser. Sa souplesse et sa flexibilité sont louées, tout comme la beauté de son architecture métallique. "L'industrie moderne montre sa capacité à créer un pur-sang aux lignes fluides paré d’atours brillants. La plus belle conquête de l'homme pourrait bien être le cheval-vapeur." On le voit à l'époque, les gens parlaient des voitures très différemment.
Le conducteur, après un check-up complet, referme l'énorme capot, et démarre la voiture qui se met en mouvement. Le narrateur décrit son expérience de la conduite de la 40 CV comme si un gros nez balayait tout sur son passage, de sorte que la surface de la route soit propre avant que les roues ne l'atteignent.
La voiture représente la civilisation de demain qui roule sur les routes du passé. Entravée ici et là par des bus, des tramways et des camions, lorgnée par des policiers à divers carrefours, la Renault se dirige lentement vers Vincennes, libérée de la grande ville étouffante. Les maisons sont moins hautes, plus espacées, entrecoupées de jardins. Les gens dans la rue changent aussi. Leurs vêtements, leur apparence, leurs préoccupations. Comme si la 40 CV se rendait sur une autre planète, le changement de paysage est décrit à mesure que les premiers champs de blé avec leurs épis dorés font leur apparition.
Bien sûr, il ne faut pas oublier que couvrir une distance totale de 380 km n'était pas chose courante au milieu des années 20, surtout dans l'un des produits phares de l'industrie automobile française. Le parcours mène de la banlieue de Paris à Meaux, puis le long de la Marne jusqu'à Château-Thierry. Ensuite, la majestueuse voiture descend par Coulommiers et Provins jusqu'à Montereau. Juste avant cette ville, on traverse la Seine et on longe le fleuve, puis on traverse à nouveau la forêt de Fontainebleau à Melun. On se dirige ensuite vers le nord-est en passant par le beau village de Vaux-Le-Vicomte jusqu'à Fontenay, puis en ligne droite vers Joinville et Vincennes pour revenir à la capitale.
Si nous devions refaire ce trajet aujourd'hui avec une Renault comme celle-ci, l'expérience serait complètement différente. Après tout, l'agitation de la ville s'est considérablement étendue autour de la capitale. Les photos qui accompagnent l'article montrent des villages vides où les bicyclettes, les charrettes à bras et les chevaux constituent les principaux moyens de transport. C'est le monde, et la France en particulier, vers lequel nous ne pouvons retourner que dans nos rêves. Grands espaces, air pur et quiétude d’une existence qui se déroule à une autre vitesse. Et vu sous cet angle, une Renault 40 CV de 9 litres et six cylindres est une pièce de technologie qui représente déjà une nouvelle génération de personnes aisées voyageant dans un luxe optimal.